La Croix
Samedi 13, dimanche 14, lundi 15 août 1994
Quotidien – 6F- N°33879
L’ÉVÉNEMENT
Vidéo
Steve Miller au pays de Brenne
The puzzling task of all true painters in the twentieth century is representation. Real forms have multiplied, but thanks notably to reproduction techniques, there is the arrival of a new object, the smooth electronic screen, allowing a disturbance of traditional perception. Like Florence de Meredieu (our edition of June 23), Steve Miller doesn’t look at what takes place “in” the screen, he perceives the false transparencies “on” the screen, thus his paintings are impregnated within the screen.
Very quickly he discovered a pictorial process, blending silk-screen and painting, which allowed entry into an unedited visual exploration being aware of the barrier or the language of the new tools. With scraping blows and with a savory blending of materials and colors, he gives back a nervous sense of representation.
Steve Miller evolved in a psychological space favorable to the practice of portraiture and the self-portrait, a practice that he renews with his new instruments of observation. With nineteen MRI slices of the brain, he represents his psychiatrist. As for the art critic Pierre Restany, he is described by an x-ray profile with glasses and a cigar, and below his x-rayed hands bleached by acrylic. In his self-portraits, one can see the artist amused by his own body in which he mixes different medical revelations: the eyes, the nose, the lungs on top of a background of white blood cells.
Thus he makes different realities cohabitate, the visible and the invisible to the naked eye. Very far from simulation, but sometimes shuffling the image with his games of entrapment, Steve Miller prefers precision and can not avoid being consumed by it. Happily, the question of the birth of the world looses itself under a second skin of painting vibrant and luminous, almost an appeasement.
Anne-Marie Morice
A l’espace Art Brenne, Steve Miller veut nous donner à voir le monde tel qu’il nous est offert par les nouvelles techniques: image de synthèse, moniteur de télévision, radiographie, échographie, analyses génétiques. Ses cinquante toiles rétrospectives nous permettent de comprendre qui est Steve Miller, peintre newyorkais âgé de 43 ans.
Le casse-tête de tout véritable peintre du XXe siècle est la représentation. Les formes du réel se sont démultipliées, or grâce notamment aux techniques de reproduction, I’arrivée d’un nouvel objet, I’écran lisse électronique, pourrait perturber la perception traditionnelle. Comme Florence de Méredieu (notre édition du 23juin), Steve Miller ne regarde pas ce qu’il se passe « dans » I’écran, il perçoit aussi les fausses transparences « sur » I’écran et désormais ses toiles en sont imprégnées. Bien vite il trouve un procédé pictural, un mélange de sérigraphies et de peinture, qui permet d’entrer dans d’inédites explorations visuelles tout en ayant conscience de la barrière ou du langage des nouveaux outils. Et à coups de raclette et de mélange savoureux de matières et de couleurs, il redonne un sens nerveux ou représenté.
Steve Miller évolue dans un espace psychologique propice à la pratique du portrait ou de l’autoportrait, pratiques qu’il renouvelle avec ses nouveaux instruments d’observation. Il va ainsi représenter par dixneuf coupes au scanner le crâne de son psychiatre. Quant au critique d’art Pierre Restany, il est décrit par une radiographie de profil avec des lunettes et un cigare, et en dessous ses mains passées, aussi au rayon X puis blanchies par l’acrylique. Dans ses autoportraits, on le voit s amuser de son propre corps dont il mélange les différents relevés médicaux, les yeux, le nez, les poumons sur fond de globules blancs. Ainsi il fait cohabiter des réalités différentes, le visible et l’invisible à l’oeil nu.
Très loin de la simulalion, bien que parfois il biaise l’image par son jeu de leurres, Steve Miller lui préfère la précision ct ne peut éviter d’être rongé par elle. Heureusement, la question de l’origine du monde se pcrd aussi dans une seconde peau de peinture vibrante et lumineuse. Presque un apaisement.
Anne-Marie MORICE
L’origine du monde, Espace Art Brenne dans le Parc naturel de la Brenne, Brigny, 36300 Coulommiers, tél. 54.37.40.16 jusqu’au 4 septembre.